Au travers de sa production scientifique de fin de Master en Droit de l’Homme et de la Démocratie à la Chaire UNESCO-DPHD de l’Université d’Abomey Calavi, Monsieur Stéphane EGUE, membre associé de l’Obsic lance le projecteur sur les raisons qui appellent une meilleure garantie du droit d’accès à l’internet dans notre pays. Ledit mémoire a pour thème : La garantie du droit d’accès à l’internet au Benin.
Selon les travaux du juriste élaborés sous la direction du Professeur Agrégé Samson Igor Bidossessi GUEDEGBE, l’accès à l’internet est un véritable facteur de développement. Alors que la controverse doctrinale sur le caractère de droit fondamental de l’accès à l’internet continue de s’enfler, la cour de justice de la CEDEAO par sa décision n° ECW/CCJ/JUD/09/20 du 25 juin 2020 établit que l’accès à Internet est un droit dérivé de la liberté d’expression qui mérite protection par la loi. Partant des insuffisances de la garantie de ce droit notamment les coupures illégales d’internet et le cout élevé de la connectivité, Monsieur EGUE s’est préoccupé des raisons pour lesquelles il est nécessaire que l’Etat béninois garantisse suffisamment le droit d’accès au réseau informatique mondial. Au terme de ses recherches, il explique cette nécessité par le fait que l’accès à l’internet est à la fois une garantie des droits de l’homme et un levier de gouvernance
Une garantie des droits humains
L’accès à l’internet participe de l’effectivité des droits de l’homme. Primo, l’accès à l’internet garantit l’effectivité des valeurs des droits humains. En effet, les droits de la personne humaine dans leur ensemble sont porteurs d’un ensemble de valeurs. Ce fondement axiologique des droits de l’homme transparaît dans l’ensemble des prérogatives que l’on attribue à chaque être humain. Il est inconcevable de trouver des droits de l’homme qui contreviennent à ces valeurs. Il est impossible d’ignorer ces valeurs pour souhaiter faire de la promotion des droits de l’homme. C’est en poursuivant ces valeurs, que le respect des droits de l’homme se fait de soi. Il s’agit principalement de la dignité et de l’égalité puis ensuite de la liberté, de la justice, de la tolérance, de la responsabilité, de la non-discrimination et du respect des autres. Il est en effet acquis que l’internet est aujourd’hui un excellent outil qui contribue dans bien de mesures à la sauvegarde de la dignité de la personne humaine et à la lutte contre l’asservissement. A ce registre, l’internet est un outil qui favorise les enseignements sur le respect de l’autre, la dénonciation de l’asservissement, de la traite des personnes ou des nouvelles formes d’esclavage. L’internet favorise aussi l’égalité des populations en éliminant les barrières spatiales et économiques liées à la connaissance de leurs droits surtout ceux humains.

Dans cette même veine, l’internet est devenu un excellent appui pour la justice. Non seulement l’institution judiciaire se sert de l’internet pour se rapprocher et faciliter sa collaboration avec le citoyen de n’importe quel endroit, mais il permet également d’entretenir la vertu justice en offrant une tribune pour son enseignement. Tout en permettant de réclamer la justice pour les cas d’injustice notoire, il sert à proposer de nouvelles conceptions de la justice. De surcroît, le réseau informatique mondial est un outil de grande liberté qui favorise le prolongement des libertés tant individuelles que collectives. De la liberté d’association à celle d’opinion, l’internet est un formidable outil de leur d’effectivité.
Secundo, l’accès à l’internet est un moyen d’effectivité des droits numériques. En effet, si tous les droits de l’homme sont porteurs d’un certain nombre de valeurs auxquelles l’internet participe directement ou indirectement, il y a certains droits de l’homme qui se prolongent directement sur l’internet. Ces derniers droits à l’instar du droit à l’information en ligne, la liberté d’expression en ligne, le droit au travail en ligne ou encore le droit au jeu en ligne, ont besoin pour leur effectivité d’un accès stable et abordable à l’internet. Pour mieux saisir ces droits numériques, il suffit de se référer à ceux non numériques comme le droit à l’eau. Le droit à l’eau ne se prolonge pas sur internet comme celui d’accès à l’information. Ainsi, lorsque l’Etat garantit à ses citoyens un accès stable à l’Internet, il leur permet de jouir des droits numériques et de profiter plus globalement des valeurs des droits de l’homme. Tout ceci porte le témoignage de l’importance de l’accès à l’internet dans la garantie des droits de l’homme. Or, les droits de l’homme sont les entrailles d’un développement durable. Il appert donc de garantir l’accès à l’internet pour espérer un développement fondé sur les droits de l’homme. Au-delà même des droits humains, l’internet est un véritable instrument de gouvernance de nos jours.
Un levier de gouvernance
L’internet s’impose de nos jours comme un instrument de gouvernance. Tant il favorise la gouvernance politique, tant il facilite celle socioéconomique. En premier lieu, l’accès à l’internet facilite la gestion politique. Avec l’internet, l’action politique des dirigeants à l’interne est mieux exécutée et mieux connue. L’internet permet également aux citoyens de participer à la gestion politique tant par leur veille que leurs contributions à travers les différentes plateformes ainsi que par le vote électronique qui en général reste encore à l’étape de balbutiement. L’internet facilite également la collaboration internationale.
Dans le contexte actuel de pleine mondialisation, les coopérations entre Etats sont renforcées grâce à l’internet. Une réunion entre chefs d’Etats, une séance de travail entre ministres et beaucoup d’activités semblables sont facilitées par l’accès à l’internet. Le fonctionnement et la collaboration avec des organismes supranationaux tels que l’ONU, la CEDEAO, l’UEMOA, la BM et le FMI en profitent. De plus, l’internet est aujourd’hui un outil qui propulse le service public. La vague de digitalisation qui embrase l’administration publique, partant des services d’état civil (ANIP) aux impôts en passant par la justice, en est une belle illustration. De surcroît, l’internet participe à assurer la sécurité. Pour jouir des services des organismes comme l’ADPD ou l’ASSI, l’état de connectivité à l’internet est important.
Deuxièmement, l’accès à l’internet est un facilitateur avéré de la gouvernance socioéconomique. En effet, le réseau des réseaux assure l’inclusion sociale en favorisant l’intégration communautaire. Avec l’internet les populations des diverses contrées se côtoient virtuellement, se rapprochent tant dans leurs cultures que dans leurs différences. L’accès à l’internet favorise le brassage des peuples et des cultures. L’accès à l’internet est aussi un outil d’intégration et de perfectionnement professionnel. Presque tout s’y apprend. On s’y forme, on s’y recycle, on y saisit des opportunités. L’internet est également un moyen d’inclusion économique et financière. Il permet l’effectivité de la liberté d’entreprendre, fait accroître les activités économiques qu’il rend sans frontières. Il facilite aussi les transactions et investissements grâce aux services financiers en ligne et aux entreprises d’investissement numérique. Dans ce même temps, il permet de surveiller les opérations financières comme c’est le cas avec la Cellule Nationale de traitement des Informations Financières CENTIF.
Recommandations
De tout ce qui précède, il est clair que le Bénin, pour davantage se révéler en termes de droits de l’homme, en termes de croissance économique, en termes de cohésion sociale et pour tout dire en matière de « développement durable », a besoin de garantir le droit d’accès à l’internet. Cette garantie appelle à œuvrer pour la disponibilité de la logistique indispensable pour la connectivité. Autrement dit, il convient d’agir dans le sens de la disponibilité d’une connexion stable dans toutes les régions, même celles les plus lointaines et dérouler des politiques publiques bien pensées qui en rendent le coût abordable. Entre textes juridiques, investissements techniques et financiers, prévisions institutionnelles, politiques publiques et autres modalités d’actions concrètes, les dirigeants ont désormais le bréviaire de motivation pour faire le chemin vers la garantie efficace et efficiente du droit d’accès à l’internet au Bénin.
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