« La parole est d’argent, le silence est d’or. » Ce proverbe signifie que parler, exprimer ce que l’on ressent ou ce que l’on a sur le cœur peut être utile et précieux, mais se taire au bon moment vaut encore plus. Je l’emprunte ici pour attirer l’attention sur la puissance du silence face à la colère.
Très souvent, nous prononçons des paroles que nous regrettons par la suite. Combien de fois n’avons-nous pas été rattrapés par des propos maladroits tenus sous l’emprise de la colère ? Il est facile d’exprimer son mécontentement avec des mots acres, mais il est bien plus difficile de réparer le tort et les préjudices causés aux tiers. « La parole est comme du crachat : une fois sortie, on ne la retire plus. » Une fois prononcée, elle ne revient jamais en arrière.
Qui n’a jamais voulu contrôler ce qu’il dit lorsqu’il est en colère ? Mais combien y parviennent réellement ? Certains prennent le temps de tourner sept fois leur langue avant de parler, même sous l’effet de la colère, mais ils sont rares. Car sous l’emprise de la colère, nous disons tout, sans filtre. Pourtant, nos paroles, elles, ne nous attendent pas. Elles s’envolent et peuvent avoir des conséquences insoupçonnées.

Il est facile de dire « je suis désolé pour ces paroles blessantes, c’était sous l’effet de la colère. » Mais les regrets ne suffisent plus lorsque ces mots commencent à produire des effets indésirables. En effet, nos paroles ne tombent pas toujours dans l’oubli. Elles peuvent être entendues et exploitées, y compris par des entités métaphysiques. Nous l’ignorons peut-être. Mais nous sommes entendus et écoutés au-delà des quatre coins de nos murs ou de là nous déversons notre colère au moment où nous nous emportons. De plus, dans certaines traditions africaines, il est courant de croire que des ancêtres peuvent s’emparer de nos paroles, peu importe le contexte dans lequel elles ont été prononcées. C’est pourquoi l’on dit souvent qu’il est important de savoir raison garder. Très souvent, rien de bon ne sort de la bouche d’un colérique. Les paroles lâchées sous l’effet de la colère ont souvent des conséquences irréversibles.
Des relations, des amitiés, des couples ont été brisés juste à cause d’une parole mal maîtrisée, déplacée ou encore blessante prononcée sans retenue. Comme la mort, la colère est un passage obligé pour tous. D’aucuns diront que c’est un examen sans échec. Mieux la colère prend tout le monde à un moment donné. Autrement dit, tout le monde peut se mettre en colère à un moment. A moins qu’il ne soit un humain. Mais il est essentiel d’apprendre à se maîtriser et avoir de retenue. Et cela passe par le silence. Comme le disait Sappho : « Dans la colère, rien ne convient mieux que le silence. » Faites du silence votre allié lorsque la colère monte. Ce besoin irrépressible de parler sous l’emprise de la colère est souvent un piège. Les mots échappés dans la précipitation deviennent des poignards. Une fois qu’ils ont atteint leur cible, il est trop tard pour les retirer.
La colère est un feu intérieur qui pousse à réagir immédiatement, mais le silence est une armure précieuse qui protège de l’irréparable. Se taire dans la colère n’est pas une faiblesse, mais une force. Cela permet non seulement de se maîtriser, mais aussi de réorganiser ses pensées et d’éviter de dire des choses regrettables. Le silence donne à l’esprit le temps de se calmer et d’évaluer si une réponse est réellement nécessaire.
Si l’envie de parler vous hante alors que vous êtes en colère, souvenez-vous de cette citation d’Euripide : « Parle si tu as des mots plus forts que le silence, ou garde le silence. »
Fiacre Awadji