L’intelligence artificielle transforme en profondeur les domaines de la création, de l’éducation et de l’emploi. Au Bénin, les jeunes sont à la croisée des chemins : pour certains, l’IA est un levier d’émancipation et d’innovation ; pour d’autres, elle incarne un risque de banalisation ou de précarisation. Une révolution technologique qui divise, fascine, et oblige à se réinventer.

Des salles de classe aux studios de design, des micros des web radios aux écrans de montage, l’intelligence artificielle (IA) ne cesse de gagner du terrain dans le quotidien des jeunes béninois. Générateurs d’images, assistants de rédaction, musiques automatisées, outils de retouche ou de mixage… Les possibilités sont vertigineuses, mais elles suscitent aussi des inquiétudes sur l’avenir des métiers traditionnels et des compétences humaines.

Une génération connectée… et confrontée

Lydie, étudiante en communication à Cotonou, salue l’impact positif de l’IA dans sa formation.
« Ça m’aide à corriger mes écrits, à trouver des idées d’articles, même à créer des visuels. Ça booste ma créativité. « 

Mais pour David, graphiste à Parakou, la crainte est bien réelle
« On dit que des logiciels peuvent faire les tâches d’un graphiste , Et demain ? On n’aura même plus besoin de nous dans les bureaux ? « 

Les jeunes créateurs face à la vague IA

Dans le domaine artistique, les opinions sont tout aussi partagées. Aurèle, 24 ans, illustrateur autodidacte, y voit un outil complémentaire
« Je m’en sers pour tester des idées, créer des arrière-plans ou générer des esquisses. Ça me fait gagner du temps. Mais c’est toujours moi qui finalise à la main. »

À l’opposé, Ricardo, jeune beatmaker , dénonce une dévalorisation du savoir-faire
« Aujourd’hui, même quelqu’un qui n’a jamais appris à composer peut générer une instru avec quelques mots… On est en train de tuer la valeur du vrai travail artistique. »

Démocratisation ou déqualification des talents ?

L’IA permet à de nombreux jeunes sans formation technique avancée d’accéder à la création. Grâce à des plateformes comme Canva AI, ChatGPT, DALL·E ou Soundraw, il est désormais possible de produire des œuvres complexes avec peu de moyens.

Mais cette accessibilité inquiète aussi
« Le risque, c’est la standardisation. Tout le monde utilise les mêmes outils, les mêmes templates. L’identité artistique s’efface », déplore Marcel, photographe à Parakou.

Un impératif de formation et d’adaptation

« Ce n’est pas l’IA qui remplacera les créateurs, mais ceux qui savent s’en servir remplaceront ceux qui l’ignorent », prévient Mr Fabrice ADJIN, consultant en transformation numérique.
Cet appel résonne avec celui d’Elisabeth, sociologue
« Ce n’est pas l’IA en elle-même qui est dangereuse, mais l’absence de formation et d’accompagnement. »

Des ateliers pratiques sont proposés pour les jeunes créateurs. Mais ces initiatives restent encore timides.

L’IA transforme aussi les repères dans l’éducation et le monde du travail. Dans les écoles, les enseignants s’adaptent tant bien que mal à ces outils. Sur le marché de l’emploi, des métiers évoluent, d’autres s’effacent, notamment ceux liés à la saisie de données, à la traduction ou à l’illustration classique.

L’émergence de l’intelligence artificielle dans les sphères créatives, éducatives et professionnelles redessine peu à peu le paysage des opportunités pour les jeunes béninois. Si certains y voient un levier d’accès, d’autres y perçoivent un facteur d’incertitude. Entre avancées technologiques et enjeux socioculturels, cette révolution soulève autant d’espoirs que de questionnements. Le débat reste ouvert, et chacun, selon sa sensibilité, ses outils et ses ambitions, est amené à se positionner dans ce nouvel environnement en mutation.

Aoulath Osseni

By Jupiter

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