Dans un contexte de transformations sociales et culturelles, le mariage au Bénin oscille encore entre deux formes principales : le mariage traditionnel, profondément enraciné dans les us et coutumes, et le mariage civil, symbole de légalité moderne. Si certains les combinent, d’autres continuent de choisir entre la tradition et la loi. Pourquoi ?

Le mariage, au-delà de son apparence festive, est une institution profondément ancrée dans la société béninoise. Et lorsqu’il s’agit de s’unir officiellement, deux voies s’ouvrent aux couples : le mariage traditionnel et le mariage civil. Deux formes différentes, deux visions du couple, et parfois… deux mondes qui s’opposent.

Le poids de la tradition : un acte social et familial

Dans la majorité des localités béninoises, le mariage traditionnel reste le premier à être célébré. Il implique la bénédiction des familles, l’échange de dot, les rites ancestraux et souvent une série de coutumes qui varient selon les ethnies.

Pour Maman Prince, mariée depuis 2019, « le mariage coutumier est une reconnaissance de notre union devant les ancêtres et la communauté. Ce sont nos parents qui le valident, et c’est ce qui compte le plus chez nous. » Ce type de mariage, souvent célébré à domicile ou dans le village familial, renforce les liens sociaux et honore les valeurs de solidarité, de respect des aînés et d’héritage culturel.

Le mariage civil : une reconnaissance légale

Face à la tradition, le mariage civil incarne la modernité juridique. Il confère une existence légale à l’union, protège les droits des époux (héritage, succession, divorce, filiation), et s’inscrit dans le cadre des lois de la République. Mr Rodrigue F. Diplômé en droit, le rappelle. « Le mariage civil est le seul reconnu par l’État. En cas de litige, seul ce contrat est valable devant les juridictions. »

Pour les jeunes couples citadins, souvent plus éduqués et tournés vers l’indépendance, ce mariage est une priorité. Il permet également d’avoir accès à certaines démarches administratives, comme l’inscription des enfants ou la cosignature d’actes officiels.

Complémentarité ou choix ?

Dans de nombreux cas, les couples choisissent de célébrer les deux mariages: d’abord le traditionnel pour satisfaire les familles, puis le civil pour se conformer à la loi. Mais pour certains, le conflit est réel. Par souci financier, des jeunes préfèrent n’en faire qu’un. D’autres refusent le mariage civil qu’ils perçoivent comme une ingérence dans leur intimité. Kossi Moutakilou, père de deux enfants, raconte son expérience. « Je suis marié coutumièrement depuis 10 ans. Pour moi, c’est suffisant. On vit ensemble, on a des enfants, on n’a jamais eu besoin d’aller à la mairie. »

Pourtant, cette position peut devenir un risque, surtout en cas de séparation ou de décès, où la compagne peut être exclue de l’héritage ou de la gestion des biens communs, faute de reconnaissance légale.

Du côté des autorités, la cohabitation des deux formes n’est pas condamnée. Le ministère des affaires sociales encourage même les couples à régulariser leur union civile après les rites traditionnels. La sociologue Mme Elisabeth analyse. « Le mariage civil ne vient pas remplacer la coutume. Il la complète. Mais le problème, c’est qu’au Bénin, beaucoup ignorent encore les implications juridiques du mariage non déclaré. »

À l’heure où les mutations sociales s’accélèrent, les mentalités évoluent aussi. De plus en plus de jeunes veulent honorer la tradition tout en sécurisant leur avenir.
L’enjeu reste donc l’information. Mieux faire connaître les droits et devoirs liés aux différentes formes de mariage pourrait aider à des décisions éclairées et respectueuses à la fois des racines et de l’avenir.

Mariage coutumier ou civil ? Entre héritage culturel et exigence légale, le choix n’est plus binaire. Il devient une question de dialogue, de conscience et d’équilibre.

Aoulath Osseni

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