À l’occasion du Colloque international et pluridisciplinaire organisé en son hommage les 6 et 7 novembre 2025 à l’Université Joseph Ki-Zerbo, le Professeur Serge Théophile Balima a laissé à la postérité une parole forte, lucide et intemporelle : « ne soyez pas seulement des transmetteurs de messages, soyez des consciences vigilantes. » C’était sa dernière leçon précédée d’une incroyable démonstration sur la formation aux métiers de l’information et de la communication.
Homme de rigueur et de conviction, le Pr Balima a marqué plusieurs générations de journalistes, communicateurs et chercheurs africains. Ce jeudi 06 novembre 2025 en prenant la parole dans le cadre de la cérémonie d’hommage à lui organisée, il a répondu à une question fondamentale qui était en même temps le thème du colloque et c’est « peut-on encore former aux métiers de l’information et de la communication face aux défis du numérique et de la société médiatique ? ».

Dans son ultime réflexion, le Pr Balima mettait en lumière une réalité souvent passée sous silence. Il l’exprimait en ces termes : « il n’existe pas de champ professionnel homogène en information et communication. » Les formations, souvent généralistes, fragmentent les savoirs au lieu d’unir les compétences autour d’un socle de valeurs communes. En Afrique, cette confusion s’accentue selon le professeur. Pour appuyer ses propos, il donne l’exemple du journaliste qui devient parfois communicateur, et le communicateur, journaliste. Cette perméabilité, qu’il qualifiait avec franchise de « prostitution intellectuelle » d’un côté et de « déguisement moral » de l’autre, brouille les repères et fragilise la crédibilité des deux métiers. Pour lui, le journaliste informe la société, tandis que le communicateur la relie à elle-même. Chacun a sa mission, son éthique, son langage.
Former des esprits avant de former des techniciens
La pensée du Pr Balima repose sur une exigence simple mais essentielle. Selon lui, la formation ne doit pas se limiter à la maîtrise des outils numériques ou des techniques audiovisuelles. Elle doit d’abord éveiller la conscience critique, la capacité d’analyse et l’intelligence sociale. « Un bon professionnel n’est pas celui qui manie un micro ou une caméra, mais celui qui comprend ce qu’il fait, pourquoi il le fait, et pour qui. »
À l’ère de la digitalisation et des médias instantanés, le Pr Balima posait une question vertigineuse :« Forme-t-on ou formate-t-on ? ». Derrière cette interrogation, une critique profonde du système de formation qui, trop souvent, façonne des exécutants soumis aux logiques économiques ou politiques, au détriment de l’esprit critique et de la liberté intellectuelle. Il appelait à bâtir des écoles capables de former des esprits libres, lucides et responsables, conscients que la communication n’est pas qu’un outil, mais une force sociale, culturelle et démocratique.
Une leçon pour l’Afrique et pour l’avenir
En rendant hommage au Professeur Serge Théophile Balima, le colloque de l’Université Joseph Ki-Zerbo, organisé par l’IPERMIC et le LAMCO, célèbre un penseur de la communication africaine qui a su faire dialoguer la théorie et la pratique, l’éthique et la liberté. Sa dernière leçon reste un appel vibrant aux nouvelles générations. « Ne soyez pas seulement des transmetteurs de messages, soyez des consciences vigilantes. L’information et la communication sont les poumons de la démocratie et de la paix. Préservez-les avec dignité, rigueur et humanité.
Fiacre Awadji
