Chaque année, sur les campus africains, des milliers d’étudiants produisent ce qui pourrait devenir la plus grande base de données stratégique du continent. Ils passent des mois sur le terrain, dans les marchés, les villages, les administrations, les entreprises, à interroger, observer, analyser. Ils identifient des dysfonctionnements, des opportunités, des pistes de transformation. Ils construisent les premiers diagnostics que nos décideurs cherchent depuis des années.
Puis tout s’arrête à la soutenance.
Le mémoire est relié, remis au jury, noté… et immédiatement oublié. Archivé dans une bibliothèque que personne ne visite. Stocké sur un disque dur coincé dans un bureau. Déposé dans une étagère où la poussière finit par recouvrir l’intelligence.
Pendant ce temps, les mêmes problématiques que ces étudiants ont étudiées continuent de coûter des millions aux gouvernements, aux entreprises, aux collectivités. On commande de nouvelles études. On paie des consultants étrangers. On réinvente la roue sans se rendre compte que la première version existe déjà.
Selon les tendances des inscriptions et soutenances, l’Afrique francophone produit environ deux cent mille mémoires par an. Chacun représente en moyenne mille heures de travail humain, soit deux cents millions d’heures de recherche appliquée annuellement. Si l’on convertit cet effort en équivalent consulting, on obtient une valeur qui peut être estimée entre dix et quinze milliards d’euros par an. Une richesse colossale qui disparaît chaque année sans avoir été exploitée.
Et ce ne sont pas des suppositions. L’Union Africaine dispose déjà d’une base continentale, DATAD-R, qui recense plusieurs centaines de milliers de thèses et mémoires africains. Ce qui prouve que les documents existent, qu’ils sont récupérables, et surtout qu’ils dorment.
Dans un pays, on peut retrouver la même scène chaque année : une étude brillante sur la gestion des déchets menée par un étudiant durant six mois, jamais transmise à la mairie. Une analyse complète sur la mortalité maternelle réalisée pour un mémoire, jamais transmise au ministère de la Santé. Une étude de marché détaillée sur une filière agricole, jamais partagée avec les coopératives concernées. Le diagnostic existe mais personne ne l’utilise. Et pendant ce temps, les mêmes institutions financent des missions de consultants étrangers chargées… de refaire exactement ce que l’étudiant avait déjà fait.
Le vrai scandale n’est pas seulement la perte d’intelligence. C’est la perte de solutions concrètes. Des solutions adaptées au terrain, basées sur des données locales, écrites dans un langage que le contexte comprend. Une richesse que nous laissons dormir simplement parce que nous ne disposons pas d’un système pour l’organiser, la centraliser, la rendre accessible, la transformer.
Il existe pourtant une piste évidente. Construire une Banque Mémoire Africaine. Pas une simple bibliothèque numérique, mais un véritable système de capitalisation nationale et continentale. Un lieu où chaque mémoire, une fois validé, serait déposé, indexé, résumé, géolocalisé, et consultable par les institutions publiques, les entreprises, les ONG, les chercheurs, les investisseurs.
Mais l’idée peut aller encore plus loin. Le continent pourrait créer la première Intelligence Artificielle spécialisée dans la connaissance produite par les étudiants africains. Une IA capable de lire automatiquement chaque mémoire, de l’analyser, de le résumer, d’en extraire les recommandations, de détecter les tendances par région, de relier les problématiques entre elles, de révéler les récurrences, de signaler les zones de blocage, de proposer des pistes d’action.
Une IA qui, en quelques secondes, serait capable de restituer une synthèse que les consultants mettent trois mois à produire. Une IA capable d’alerter une mairie dès qu’un mémoire traite d’un problème spécifique à son territoire. Une IA pouvant montrer qu’un sujet étudié dans une université peut résoudre un enjeu dans une autre ville ou un autre pays. Une IA permettant aux gouvernements de vérifier si une étude existe déjà avant d’en commander une nouvelle.
L’impact serait immense. Les décideurs prendraient leurs décisions sur des données locales réelles. Les entreprises accéderaient à des diagnostics précis sans budget exorbitant. Les jeunes verraient leurs travaux transformés en projets concrets. Les universités deviendraient des acteurs centraux du développement national. Les budgets publics seraient allégés. Les études ne seraient plus perdues. Et l’Afrique cesserait de dépendre d’expertises importées.
Mais surtout, une telle plateforme permettrait de créer une continuité intellectuelle. Aujourd’hui, chaque étudiant recommence de zéro. Ce système permettrait à un étudiant de Master de poursuivre un travail réalisé trois ans plus tôt. De compléter une enquête. De mettre à jour des données. De transformer une réflexion en solution. De construire enfin une recherche utile, cumulative, durable.
La connaissance qui ne circule pas s’éteint. La connaissance qui circule transforme.
L’Afrique ne souffre pas d’un manque d’intelligence. Elle souffre d’un manque d’organisation de son intelligence. Des millions de pages attendent d’être utilisées. Des étudiants attendent que leur travail serve enfin. Des institutions cherchent des solutions que leurs propres universités ont déjà produites.
Une Banque Mémoire Africaine combinée à une IA capable d’absorber et d’interpréter cette intelligence serait un tournant historique.
Nous n’avons pas besoin de produire plus d’études. Nous devons donner une vie à celles que nous avons déjà.
Je suis L’IMPACTEUR 🔥 🔥 💣
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Les solutions de demain sont peut-être déjà écrites depuis longtemps.
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